Pourquoi s’intéresser encore à la question de la langue dans la dramaturgie québécoise ? Près de quarante ans après l’onde de choc des Belles-soeurs, l’essentiel n’a-t-il pas été dit ? En 1989 déjà, Lucie Robert résumait ainsi la situation : liée bon gré mal gré à l’imaginaire identitaire, la dramaturgie québécoise « pose de manière obsessionnelle, et sous toutes les formes possibles, la question de la langue. Elle n’en finit plus de demander comment parler ? dans quelles circonstances ? pour dire quoi ? avec quels effets ? dans quelle langue ? Qu’est-ce que cette obsession nous apprend sur nous-mêmes en tant que collectivité[1] ? » Dans cette optique, l’appropriation dramaturgique du joual dans les années 1960-1970 constituerait le point culminant d’un processus d’affirmation nationale balayé, dans le désenchantement des années 1980, par de plus singulières pratiques d’auteurs dramatiques et scéniques et, dans le même temps, par une plus grande diffusion internationale du théâtre québécois[2]. Conséquence de cette commode fracture historique : « le joual et ses avatars demeurent, aujourd’hui encore, la référence obligée de la réception critique du théâtre québécois à l’étranger, tout comme la langue demeure le point aveugle des recherches théâtrales au Québec[3] ».
Biographie
Louise Ladouceur est professeure à l’Université de l’Alberta, elle cosigne cet ouvrage avec Sathya Rao et Serge Bergeron.