Entre Madame Rosa et Momo, c'est un amour maternel qui ne passerait pas par les liens du sang, c'est l'amitié entre les peuples juif et arabe, c'est le poids de l'Histoire allégé par l'appétit de vivre. Le roman se passe à Belleville, vingtième arrondissement de Paris, sixième étage sans ascenseur. Momo a dix ans, peut-être quatorze en réalité. Cela fait beaucoup de chiffres pour un môme qui réinvente le dictionnaire et a le sens de la maxime : «Je pense que pour vivre, il faut s'y prendre très jeune, parce qu'après on perd toute sa valeur et personne ne vous fera de cadeaux.» Lisez, vous serez touchés par les mots de Momo.
L'accompagnement critique s'attache à définir la «voix» de Momo (création d'une syntaxe et d'un lexique) et étudie le mélange des registres (tragique et comique). Deux groupements de textes, l'un sur l'utilisation de la langue orale, l'autre sur le deuil de la mère, complètent l'étude du roman.
Romain Gary, pseudonyme de Romain Kacew, né à Moscou en 1914, est élevé par sa mère qui place en lui de grandes espérances, comme il le racontera dans
La promesse de l'aube.
Pauvre, « cosaque un peu tartare mâtiné de juif », il arrive en France à l'âge de quatorze ans et s'installe avec sa mère à Nice. Après des études de droit, il s'engage dans l'aviation et rejoint le général de Gaulle en 1940. Son premier roman,
Éducation européenne, paraît avec succès en 1945 et révèle un grand conteur au style rude et poétique. La même année, il entre au Quai d'Orsay. Grâce à son métier de diplomate, il séjourne à Sofia, La Paz, New York, Los Angeles.
En 1948, il publie
Le grand vestiaire, éducation sentimentale d'un adolescent au lendemain de la guerre, et reçoit le prix Goncourt en 1956 pour
Les racines du ciel, fresque de la vie en Afrique Équatoriale où un idéaliste, Morel, a décidé de sauver les grands troupeaux d'éléphants que les Blancs et les Noirs menacent d'exterminer.
Consul à Los Angeles, il épouse l'actrice Jean Seberg, écrit des scénarios et réalise deux films. Il quitte la diplomatie en 1961 et écrit des nouvelles,
Les oiseaux vont mourir au Pérou et un roman humoristique,
Lady L avant de se lancer dans de vastes sagas :
La comédie américaine et
Frère Océan.
Sa femme se donne la mort en 1979 et les romans de Gary laissent percer son angoisse du déclin et de la vieillesse : Au-delà de cette limite votre ticket n'est plus valable, livre cru et dur, mais aussi roman d'amour et de tendresse dans lequel Gary s'attaque au sujet tabou de l'impuissance sexuelle, Clair de femme, chant d'amour à cette « troisième dimension de l'homme et le la femme : le couple », et Les cerfs-volants, ultime roman qui renoue avec le temps du nazisme et de l'Occupation.
Romain Gary se suicide à Paris en 1980, laissant un document posthume où il révèle qu'il se dissimulait sous le nom d'Émile Ajar, auteur de romans à succès : Gros-Câlin, L'angoisse du roi Salomon et La vie devant soi, histoire d'amour d'un petit garçon arabe pour une très vieille femme juive, qui a reçu le prix Goncourt en 1975.